Depuis plus d'un siècle, Madagascar honore une tradition équestre qui a façonné son histoire culturelle et sportive. En 1903, les terrains sacrés de Mahamasina ont été transformés en un vibrant hippodrome par le gouverneur général Gallieni, marquant ainsi le commencement d'une ère nouvelle. Ces courses, initialement introduites dans un contexte de domination coloniale, visant à éroder l'identité culturelle des Malgaches, se sont peu à peu enracinées dans l'essence de la société, forgeant un nouveau sens d'unité post-coloniale et un symbole de résilience.
Baovola: synonyme de fougue et de talent
Parmi les légendes de cette époque, le cheval nommé Baovola est devenu une figure emblématique, inspirant non seulement les générations de jockeys mais aussi traversant les frontières du sport pour baptiser un célèbre footballeur malgache. L'image de Baovola, crinière au vent, symbolise l'énergie indomptable et le talent qui ont caractérisé les courses hippiques de l'île.
Une transformation culturelle
Avec le temps, les résidents d'Antananarivo ont réinterprété cette activité imposée pour en faire un élément central de leur "malgachéité", créant une symbiose unique entre les traditions importées et les expressions culturelles indigènes. L'hippisme, aux côtés du rugby et du théâtre, a cessé d'être un simple passe-temps pour devenir un pilier de l'identité culturelle malgache. Des artistes, musiciens, écrivains, et peintres célèbres étaient souvent des spectateurs assidus, témoignant de l'importance de ce sport dans la société.
Lexique et poésie: L'hippisme dans l'art malgache
L'influence des courses de chevaux est allée au-delà du simple sport, s'immisçant dans la poésie et la langue courante d'Antananarivo. Des termes particuliers ont émergé, reflétant la façon unique dont la ville a embrassé l'hippisme. Cette intégration culturelle a aidé la population à surmonter les traumatismes de l'ère coloniale, trouvant la joie et l'unité dans les exploits sportifs et artistiques.
Confluence des mondes: rural et urbain
L'hippodrome n'était pas seulement un lieu de spectacle; il représentait un point de rencontre vital entre les habitants urbains et ruraux. Des éleveurs de la campagne se mêlaient à la foule citadine, leurs chevaux compétant pour la gloire. Cette interaction a également marqué un tournant socio-politique, car nombreux étaient ces éleveurs malgaches qui sont devenus les premiers à obtenir la nationalité française, brouillant davantage les lignes entre les identités coloniales et postcoloniales.
Redécouvrir l'histoire: expositions et documentaires
Pour commémorer cet héritage, une série d'événements est prévue, notamment une exposition photographique inédite et des conférences animées par des figures emblématiques comme le jockey Rakotoarisoa. Ces festivités ne visent pas seulement à célébrer 120 ans de courses hippiques, mais aussi à raviver la mémoire collective de la nation. De plus, la première diffusion du documentaire "Le temps perdu" promet de plonger les spectateurs dans les profondeurs de cette tradition équestre, soulignant son rôle dans la formation de la citadinité postcoloniale.
Le 120e anniversaire n'est pas seulement une célébration du sport, mais un hommage à l'esprit indomptable de Madagascar, témoignant de sa capacité à réinventer son histoire, ses traumatismes et ses triomphes, à travers la passion de l'hippisme.